Entretien avec Ndèye Diago Dièye, Directrice Générale NYALA Ventures

 Bonjour, Mme Sow, pourriez-vous vous présenter aux lecteurs de Croissance Magazine ? 

Je suis Ndèye Diago Dièye, Madame Sow. Et je suis Sénégalaise, donc née et grandie au Sénégal. Originaire de la commune de Mboro, plus précisément dans la région de Thiès où j’ai fait mon cycle primaire. Et par la suite, j’ai intégré la maison d’éducation Mariama Bâ de Gorée où j’ai fait mon cycle secondaire jusqu’à la 2nde. J’ai obtenu une bourse de l’État du Sénégal pour aller faire mes études au Royaume-Uni au Collège du Monde Uni où j’ai fait ma première et ma terminale pour obtenir un bac international. Depuis le lycée, j’ai fait un peu un focus sur tout ce qui est sciences économiques, mathématiques et langues, et c’est ce que j’ai poursuivi au niveau universitaire. Quand je suis partie aux États-Unis pour débuter mon cycle universitaire dans l’état du Minnesota, j’ai poursuivi des études en sciences économiques et en mathématiques et j’ai appris une nouvelle langue: le japonais. J’ai toujours aimé les langues c’est pourquoi j’ai fait un double diplôme en sciences économiques et en japonais entre les États-Unis et le Japon. J’ai rejoint le secteur des services financiers : j’ai commencé à New York sur Wall Street, au Crédit Suisse puis j’ai rejoint la Banque Suisse dans leur bureau à Londres. Après quelques années, j’ai intégré une des plus grandes banques britanniques où j’ai aussi fait mes armes. Mais après quelques années, je suis rentrée au Sénégal. Bien sûr, par nostalgie, mais aussi parce que je voyais toutes les opportunités qui naissaient sur le continent. On passait beaucoup de temps dans les cercles financiers à Londres à parler des opportunités, je voyais des gens qui quittaient Londres pour venir s’installer sur le continent et je me disais, pourquoi pas moi qui suis originaire du Sénégal ? Pourquoi ne pas rentrer et profiter de ces opportunités et participer au développement économique de mon propre pays? C’est comme ça que je suis rentrée après une dizaine d’années. Et j’ai eu la chance d’avoir un parcours ici au Sénégal, assez diversifié : j’avais commencé par le cabinet Mazars où j’étais consultante senior, et ça a été un bon trait d’union entre le monde anglo-saxon auquel j’étais habitué et le monde des affaires franco-françaises, donc passer par le cabinet pour pouvoir faire cette transition a été une aubaine. Et plus tard j’ai été cooptée par le DG fondateur du FONSIS (Le Fonds Souverain d’Investissements Stratégiques) au tout début de l’année 2013. Et ça aussi, c’était une énorme opportunité de pouvoir mettre en place pour la première fois un fonds souverain au Sénégal. C’était même le premier Fonds souverain en Afrique subsaharienne qui n’était pas basée sur des ressources pétrolières et gazières. Il fallait le faire, c’était donc un défi et avec le DG fondateur et l’équipe fondatrice, on l’a relevé et on a pu mettre en place le FONSIS. Et c’est au FONSIS qu’a débuté ma passion pour le financement des PME, parce que le FONSIS avait pour rôle aussi de soutenir les PME. Et dans ce cadre-là, un de mes premiers projets au FONSIS, c’était la mise en place du Fonds PME : Teranga Capital. Donc le FONSIS était actionnaire, c’était un de mes premiers projets d’investissement et j’étais représentante du FONSIS au sein de la gouvernance de Teranga Capital que j’ai fini par rejoindre (toujours par passion). J’ai intégré Teranga Capital en tant que membre de l’équipe dirigeante, donc j’ai quitté le FONSIS pour Teranga Capital. Et là aussi, ma passion pour le financement des PME a continué et ça s’est concrétisé par la mise en place d’un projet de financement en collaboration avec la Fondation Mastercard qui a abouti sur le financement de plus de 1000 entreprises, 1000 PME et plus de 16000 micro-entrepreneurs. Et donc là aujourd’hui, j’ai remonté un peu la chaîne, je suis dans un Fonds de Fonds. C’est un Fonds d’investissement qui investit dans les fonds PME en Afrique. Voici un peu qui je suis du point de vue professionnel.

D’accord, pouvez-vous me parler un peu plus du programme Suqali de Téranga Capital en partenariat avec la Fondation Mastercard ? Vous avez parlé d’un nombre assez important de PME touché quand même.

Effectivement, et il s’agit du programme de financement Suqali, il y a même une plateforme dédiée.  C’est un programme qui a été mis en place en réponse à la crise économique qui était née de la COVID-19 avec la Fondation Mastercard. Et l’idée, c’était d’élargir l’accès au financement des PME au Sénégal, mais aussi des micro-entrepreneurs qui sont surtout dans le secteur informel. Donc l’idée, c’était quoi ? C’était de se dire qu’à cause de la COVID, il y a des entreprises qui étaient déjà inclus dans le système financier ou des micro-entrepreneurs mais qui ont subi un choc qui les a exclus du système financier. Peut-être     parce que leur activité est à l’arrêt ou bien leur chiffre d’affaires a baissé de telle sorte qu’ils sont en défaut avec leurs institutions financières ou qu’ils ne peuvent plus avoir accès au crédit. Donc il y avait ce volet là, mais aussi se dire qu’indépendamment de la crise économique liée à la pandémie, des entreprises et des micro-entrepreneurs n’avaient pas accès au financement. Notamment quand on parle de la cible : “Jeune femme en zone rurale” qui est vraiment une cible de prédilection de la Fondation Mastercard. C’est dans ce contexte de double objectif que Teranga Capital a noué ce partenariat avec la Fondation Mastercard. C’était un programme de 30 000 000 de dollars. À l’époque, c’était à peu près 18 milliards de francs CFA et il fallait trouver un mécanisme pour injecter ces fonds assez rapidement pour venir en soutien aux entreprises et aux micro-entrepreneurs qui en avaient besoin. Vous savez qu’injecter une telle somme dans un temps record de moins de 36 mois et atteindre des milliers et des milliers de bénéficiaires, ce n’est pas chose facile. On est passé par ce qu’on appelle des partenaires de mise en œuvre, des institutions financières et non financières, avec qui on a noué des partenariats et on s’est accordé sur les mécanismes de financement des bénéficiaires. Je donne un exemple: une institution de microfinance qui a un réseau national assez touffu pour pouvoir atteindre les bénéficiaires, on noue un partenariat avec cette institution de microfinance qui reçoit les fonds du programme Suqali et qui, par la suite, met à disposition les fonds, mais en tant qu’institution financière. L’institution est souveraine dans la prise de décision, donc ça passe par ses instances de gouvernance parce que le risque de crédit demeure avec cette institution financière. Du point de vue du bénéficiaire, il n’y a pas de changement. Ils vont juste se rendre compte que les conditions de crédit sont quand même assez allégées. Et les bénéficiaires comprennent que derrière, c’est surtout par rapport à la relance post COVID-19 que cela est venu en soutien à leurs activités.Par exemple ce qui peut changer, c’est le taux d’intérêt qui est allégé ou bien les garanties ou le processus d’obtention du crédit. Tous nos partenaires de mise en œuvre se sont engagés à les raccourcir. Parmi ces quinzaines de partenaires de mise en œuvre, il y avait des institutions de microfinance, mais aussi des banques commerciales, des banques de développement et des fonds d’investissement de la place également des incubateurs et des accélérateurs qui nous ont vraiment aidés à surtout toucher les jeunes entrepreneurs. Parce qu’il y avait, par exemple, des incubateurs au sein des universités Gaston Berger (UGB) de Saint- Louis ou Assane Seck de Ziguinchor etc. Ces incubateurs au sein des universités nous ont vraiment permis de toucher la cible “étudiants entrepreneurs”. C’était assez crucial pour nous de pouvoir atteindre cette cible, avec la jeune population qui arrive dans le monde du travail par millions d’ici 2035. Il fallait trouver un moyen de les aider à mettre en place leurs propres entreprises au lieu de les laisser aller au chômage parce qu’ils ne trouvent pas de poste dans le monde du travail. C’est un programme qui était très diversifié en termes de mécanisme d’intervention grâce à la palette partenaires de mise en œuvre dont certains pouvaient faire des crédits très courts termes, des crédits de campagne, des crédits d’investissement et moyens termes. D’autres faisaient des prêts d’honneur, par exemple quand il s’agit d’un incubateur ou d’accélérateur, qui fait des prêts aux jeunes entrepreneurs et aussi les fonds d’investissement qui a pu mettre en place un système de prise de participation, accompagnée de mise à disposition de quasi capital. Cela nous a permis de mettre en place la plateforme Suqali sur lequel vous pouvez accéder. Et qui nous permettait de mettre en relation des bénéficiaires et les partenaires. Et là, chaque bénéficiaire pouvait se connecter, soumettre son besoin de financement et donner des informations sur son profil et en fonction de cela, la plateforme avait des algorithmes qui permettaient de faire un Matching, une mise en correspondance entre le besoin qui est exprimé et les partenaires de mise en œuvre et leur offre de financement. Par exemple, quelqu’un qui avait besoin d’un petit prêt de 100 000 francs en zone rurale dans une certaine activité, pouvait être orientée vers un partenaire de mise en œuvre, institution de microfinance dans la même zone. Et un autre entrepreneur qui a un besoin de 50 000 000 de francs CFA, 100 000 000 de francs CFA avec une entreprise assez avancée, aurait plus besoin d’un fonds d’investissement etc. C’est ce qu’on a fait avec la Fondation Mastercard qui nous a soutenu tant d’un point de vue financier en mettant à disposition les fonds, mais aussi sur le point technique en mettant à disposition les ressources qu’il fallait pour mener à bien ce projet qui, avouons-le, était ambitieux :  18 milliards de francs CFA à injecter en moins de 36 mois, c’était quand même un défi, mais grâce aux partenariats stratégiques liés avec les partenaires de mise en œuvre, on a quand même pu y arriver pour financer 1000 PME et plus de 16 000 micro entrepreneurs.

On a l’impression qu’un programme pareil n’a jamais été mis en place dans l’environnement des PME jusqu’ici…  

Pas à ma connaissance, sauf si ça a été mis en place sans pour autant être communiqué. Mais un programme de cette taille, effectivement, je n’en ai jamais entendu parler. C’est à vérifier, parce que souvent, les institutions financières font ce genre de programme avec les bailleurs, sans pour autant communiquer dessus. Donc, on peut voir par exemple tout d’un coup une campagne de promotions : ”Nous faisons des crédits à taux allégé sur telle durée, pour tel secteur d’activités etc”. Et souvent il y a un bailleur derrière. Et même l’État du Sénégal, souvent, fait ce genre de programme. Par exemple, il y a quelques années, il y avait un programme pour financer les fonctionnaires avec des taux allégés. Il y a un bailleur derrière qui est prêt à prendre ce risque, à mettre des conditions allégées pour justement atteindre cette cible. Maintenant, comme vous dites, c’est à vérifier si un programme de cette taille de 18 milliards a été fait avec autant de bénéficiaires, je n’en ai pas connaissance.

Vous avez récemment reçu un prix au forum Angaza, ça allait dans ce sens ?  

C’était plus large. Angaza qui signifie “illuminer”. Le forum Angaza est une plateforme qui vise à redéfinir l’image de la finance en Afrique subsaharienne. Il octroie plusieurs Prix et la distinction dont j’ai bénéficiée récemment est surtout pour les femmes cadres de la finance en Afrique subsaharienne, la Banque et l’assurance inclut, c’est assez large. L’idée c’est de mettre en relief, le travail que nous faisons pour justement faciliter l’accès au financement des entreprises, mais aussi des micro-entrepreneurs. La particularité aussi de ce prix, c’est qu’il ne regarde pas juste le parcours professionnel, il prend aussi en compte les activités en dehors de la vie professionnelle. Est-ce qu’il y a des activités sociales dans laquelle la personne est impliquée ? Et quel est aussi le lien, s’il y en a, avec ce que la personne fait dans le cadre professionnel ? Donc c’est une distinction qui se veut polyvalente, qui n’est pas juste focalisée sur le parcours professionnel mais va au-delà. Mais effectivement, ça reste dans le domaine des services financiers et c’est aussi un peu partout en Afrique. C’est la première fois qu’ils ouvrent ce prix à l’Afrique francophone, j’ai été assez chanceuse d’être retenue avec une collègue d’ORABANK Bénin.

On voit que vous avez d’autres activités au-delà de vos activités professionnelles. Ce sont des activités associatives ou caritatives? Pouvez-vous nous en parler? 

Oui, c’est plutôt caritatif, plutôt des activités liées à l’Association “Noor Entraide et charité” qui fait des actions caritatives un peu partout dans le Sénégal, plus précisément à Dakar. En assistant par exemple des malades qui ont un peu du mal à se faire soigner, qui n’ont pas de couverture maladie, les membres de l’association cotisent et parfois font des dons pour les assister. Il y a aussi des activités au sein des orphelinats aussi bien à Dakar qu’en dehors de Dakar. Il y a aussi des Daaras modernes que nous soutenons pour améliorer les conditions de vie de leurs apprenants. Nous faisons aussi beaucoup d’actions, spécialement durant le Ramadan où nous mettons à disposition des milliers de kits alimentaires à Dakar et en dehors de Dakar. Et nous faisons d’autres activités comme l’assistance pour l’inhumation des morts inconnus. C’est un fléau qui n’est pas très connu mais qui est là. Nous faisons des dons pour assister à l’inhumation afin que cela se fasse de façon digne. Et, nous participons aussi à la construction de puits pour faciliter l’accès à l’eau potable surtout en zone rurale. Vraiment ce sont des activités diversifiées que l’association entreprend et nous sommes plus de 600 membres un peu partout au Sénégal et à l’étranger. Voilà ce qui occupe la majorité de mon temps en dehors du cadre professionnel et de ma situation de maman et d’épouse, il ne faut pas l’oublier, car cela fait partie aussi de notre vie de femme active.

Vous êtes  toujours à Teranga capital ?  

J’ai quitté Teranga Capital il y a un peu moins d’un an. Là j’ai rejoint un Fonds de fonds qui s’appelle Nyala Venture basé aux Pays-Bas. Toute l’équipe est aux Pays-Bas, mais moi je suis restée baser à Dakar parce que j’ai ma famille ici. C’est un fonds qui investit dans les fonds d’investissement qui vient à peine de démarrer.

Si vous aviez des conseils à donner à des entrepreneurs, quels conseils leur donneriez-vous ? 

Le premier conseil, ils l’ont entendu de tout temps : c’est d’identifier le problème auquel ils sont en train de trouver une solution. Donc si je lance mon entreprise avec des produits ou bien des services, il faudrait vraiment que je puisse me demander en tant qu’entrepreneur : “qu’est-ce que cela va résoudre ? Quel est le problème que ça va résoudre ?” Et “qui sont les clients potentiellement qui ont ce problème-là” pour que j’aille les trouver. Je pense que quand on a cette démarche-là, automatiquement, le produit ou le service va se vendre tout seul. On n’aura même pas besoin de passer trop de temps à faire de la communication ou bien à convaincre. Je pense que cela fait partie de la connaissance du marché, de la connaissance de sa clientèle, de la connaissance de toutes les parties prenantes et souvent les entrepreneurs. Parfois je pense qu’il leur faudrait ce recul parce que, ce qui peut paraître une excellente idée pour l’entrepreneur n’est pas peut-être une idée qu’on peut mettre à l’échelle car il n’y a pas assez de clientèle. Je pense que c’est le premier pas à poser. Qu’est-ce que mon projet va résoudre comme problème ? Comment mon produit ou mon service va contribuer à l’amélioration de la condition de vie de mes clients ? Je pense que s’ils ont réponse à cela, ils peuvent se lancer à fond, et c’est sûr que le projet va marcher. Pourquoi ? Parce que la question qui va suivre après, c’est OK. J’ai identifié un problème que je peux résoudre, comment est-ce que je peux me faire financer ? Quand on va en face d’un investisseur ou bien une institution financière et qu’on leur dit, voici le problème que je peux résoudre, le potentiel de clients qui vont s’y retrouver normalement, l’investisseur ne devrait pas avoir du souci à suivre l’entrepreneur. Je pense que là où ça peut bloquer, c’est que quand l’investisseur se dit : Est-ce que le marché est là ? Est-ce que le produit ou le service résout un problème? Est-ce que ça va marcher si je mets à disposition les fonds? Donc je pense que vraiment tout tourne autour de cette question centrale de vraiment résoudre un problème réel pour le compte de ses clients. Et je pense que dès qu’on a ça, avec la passion qui fait briller l’entrepreneur, on peut convaincre très facilement un investisseur ou bien une institution financière sans même avoir à faire des présentations PowerPoint élaborées, des business plans assez longs et des fichiers Excel compliqués. Lorsqu’un investisseur voit la passion, très rapidement, l’investisseur est convaincu. Ce sont quelques conseils que j’aimerais partager avec mes amis entrepreneurs et que moi-même j’applique. Parce que moi-même je me considère Entrepreneure, quand je mets en place, par exemple, un fonds d’investissement PME, je me dis : la solution que je propose, comment est-ce que ça va résoudre un problème ? Quand on met en place un programme de financement pour le compte de la Fondation Mastercard, avant d’être retenu, nous avons dû proposer une solution à la Fondation pour développer pour déployer les 18 milliards. Donc je me dis, quel est le problème que je résous pour ces clients et comment je le résous ? Et dès qu’on a trouvé la réponse à cela, on a pu nouer ce partenariat très facilement. Et même nouer d’autres partenariats qui ont suivi. Donc vraiment il faut que l’entrepreneur se mette dans cet état d’esprit de trouver des solutions aux problèmes de ses clients potentiels.

Est-ce que vous avez un dernier mot? Quelque chose que vous voulez dire ? Un cri du cœur ? 

Il y a tellement de choses à dire, mais je pense que je vais revenir sur la raison pour laquelle je suis rentré au Sénégal. C’est que : le potentiel est énorme, et je pense que les entrepreneurs, les investisseurs, les bailleurs, tout le monde commence à en prendre bien conscience. Mais j’aimerais bien que nous-mêmes, qui sont ici, nous en prenions plus conscience. Et malheureusement, il y a encore ce fléau. Peut-être qu’il y a un focus sur les immigrants qui partent de façon informelle ou clandestine par les bateaux, mais il y a aussi, une bonne partie de nos ressources, de nos cerveaux qui partent par la voie légale, qui quittent le pays ou le continent et vont s’installer ailleurs. Et la contrepartie de cela, c’est que nous avons d’autres experts qui viennent d’ailleurs pour s’installer et profiter de ces opportunités. Ce qui pour moi est quand même dommage, parce que voilà, le potentiel est là chez nous, c’est juste à nous de le voir, de l’exploiter, d’en prendre pleine conscience et d’avoir plus confiance en nous. C’est quand même assez ironique que l’Afrique qui est le continent le plus riche en termes de ressources naturelles soit paradoxalement le continent le plus pauvre. On devrait dépasser l’étape de se dire que oui, parce qu’il y a eu des périodes de stagnation ou bien de recul à cause de la colonisation, de l’esclavage. Là, vraiment, c’est à nous de prendre notre destin en main et de savoir qu’on est le continent le plus riche en termes de ressources naturelles. Le monde entier est en train de se ruer sur l’Afrique, sauf l’Afrique. Donc vraiment ça, peut être que c’est un discours, on me dira : “afro-optimiste”, “panafricaniste”, je n’aime pas les labels, mais bon, en tout cas je sais qu’il y a du potentiel là-bas et c’est une bonne nouvelle que la jeunesse soit en train d’en prendre conscience et j’espère qu’à partir d’ici, ça ne va qu’augmenter pour que vraiment nous puissions prendre notre destin en main et réaliser notre plein potentiel.

Vous avez fait le tour du Sénégal. Quelle expérience en avez-vous tirée ? Par rapport au pays, aux entrepreneurs, et à tout ce que vous avez eu à faire ?  

Là, j’en ai la chair de poule en vous parlant, une très belle expérience. Très belle expérience, la rencontre d’entrepreneurs qui ont des projets très innovants et qui ont la passion. Et qui ont quand même démarrer et font avec les moyens du bord. Quand on voit cela, on ne veut que les accompagner. Ils ne demandent qu’à être financés. J’en ai vu des projets, j’étais ébahie, des jeunes qui commencent avec de petites sommes, mais qui se serrent la ceinture, qui demandent à être accompagnés par ici et par là et qui veulent innover et surtout en zone non urbaine, en zone rurale et périurbaine. Je pense que nous aussi qui sommes basés à Dakar, souvent on est un peu biaisé en pensant que tout se passe à ici. C’est vrai qu’il y a une majorité de l’activité économique du pays ici à Dakar. Mais il y a des pépites, des entreprises en dehors de la région de Dakar qui sont en train de faire de très belles choses et qui ne demandent qu’à être accompagnées. Personnellement, si je devais par exemple revenir au Sénégal et travailler dans un fonds de financement PME, c’est très certainement des zones sur lesquelles je vais me focaliser parce que le potentiel est énorme. Et dans certaines zones c’est encore le désert, il n’y a pas assez d’investisseurs, d’institutions financières. Les infrastructures sont concentrées sur la côte ouest du Sénégal, entre Saint-Louis Dakar et Ziguinchor, mais n’empêche le potentiel est là et surtout dans tout ce qui est chaîne de valeur agricole. C’est extrêmement incroyable ce qui se passe et les gens ne sont pas au courant. Il y a un potentiel énorme qui ne demande qu’à être exploité. Vraiment, nous avons un très beau pays, quand je le dis, ça fait est un peu cliché, mais il faut le voir, il faut aller à l’intérieur du pays pour voir ces beaux projets, ces entrepreneurs qui sont passionnés et qui sont restés dans leur terroir pour le développer.

Source: https://croissance.growhubsenegal.com/ndeye-diago-dieye-une-vie-au-service-de-leconomie-locale-et-de-lentraide/